2020 et 2021 auront été marquées par une crise sanitaire sans précédent, contraignant un grand nombre d’entreprises à fermer leurs locaux. Pour celles qui en ont eu la possibilité, leurs salariés sont passés en télétravail.
Pour endiguer la propagation du variant Omicron du Covid-19, le télétravail a été rendu obligatoire en janvier 2022 dans toutes les entreprises pour lequel il est possible à raison de 3 à 4 jours par semaine.
Selon une étude, près de 40% des salariés français (soit environ 8 millions de personnes) ont été confronté au télétravail pendant l’un des deux confinements de 2020. Parmi eux, 9 salariés sur 10 interrogés ont déclaré vouloir poursuivre leur activité à distance même après la pandémie. Peut-on alors supposer que, malgré sa nécessité due au contexte sanitaire, le télétravail puisse se normaliser au sein des entreprises ?
Télétravail, un nouveau phénomène pour les entreprises ?
Le télétravail consiste, pour un salarié, à effectuer une partie, voire la totalité de ses missions depuis son domicile. Pour être mené à bien, l’utilisation des différentes technologies modernes à disposition des entreprises est essentielle pour garantir une communication idéale entre le salarié qui télétravaille et son manager et/ou son employeur.
Bien que sa généralisation soit récente et due au contexte sanitaire, le télétravail n’était pas méconnu ou peu populaire auparavant : il a connu une certaine expansion ces dernières années, conséquence de la mondialisation qui a entraîné une vague d’outsourcing de la part des grands groupes. Ces entreprises ont eu tendance à transférer certaines de leurs compétences vers des sous-traitants, parfois à l’étranger pour des raisons économiques.
D’autres entreprises ont quant à elles commencé à appliquer le télétravail pour améliorer le bien-être de leurs salariés en proposant un nombre de jours de télétravail par semaine aux effectifs. En effet, pour un salarié, le télétravail peut proposer plusieurs avantages non-négligeables pour son confort :
- Un gain de temps car il n’a pas à se rendre sur son lieu de travail, qui évite aussi les retards, notamment en période de grève ;
- Une meilleure flexibilité dans ses horaires de travail ;
- Une plus grande autonomie et une relation de confiance ;
- Une meilleure proximité avec ses proches permettant un meilleur rapport vie professionnelle / vie de famille.
Une alternance entre travail à distance et travail sur site
A la fin du premier confinement en mai 2020, beaucoup d’entreprises ont repris leur activité, même partiellement, dans leurs locaux, donnant lieu à deux grandes vagues de reprise du travail :
- La première a eu lieu en septembre 2020, où chaque entreprise a réfléchi à une formule de retour au travail pour rassurer leurs salariés (dont un grand nombre s’avérait peu favorable à un retour sur site) et garantir leur sécurité face au Covid-19. Une solution à mi-chemin entre les deux modes de travail a été appliquée en majorité, permettant d’alterner entre télétravail et travail sur site ;
- La seconde vague, débutée en janvier 2021 en France, aura permis aux entreprises d’adapter leurs dispositifs et d’améliorer ce qui a été engagé au cours de l’année pour permettre une solution efficace sur le long terme.
Heureusement pour les millions de salariés concernés, le télétravail est en général plus confortable pour eux. De plus, les entreprises plus modestes ont pu, au fil du temps, fournir le matériel nécessaire pour garantir de meilleures conditions de travail à distance.
Certains employeurs ont même décidé d’encourager leurs salariés en télétravail en offrant un bonus salarial, en créant des formations via des plateformes d’apprentissage, et en accordant une plus grande importance à la vie personnelle des effectifs.
Dans quels lieux le télétravail est-il possible ?
On assimile logiquement le télétravail au travail du salarié à son domicile. Pourtant, cela signifie seulement que le salarié travaille à distance des locaux de l’entreprise : il n’est pas obligé de rester cantonné à son lieu de résidence.
Certaines entreprises ont même mis à disposition de leurs salariés des lieux ou des espaces de coworking. Le télétravail en dehors du domicile doit toutefois respecter deux conditions :
- Le lieu choisit doit présenter des conditions propices au travail (connexion internet suffisante, cadre calme, etc…) ;
- L’employeur doit avoir connaissance de l’adresse et l’endroit depuis lequel le salarié télétravaille pour le reconnaître comme lieu de travail effectif, essentiel si un accident survient.
Il est alors légitime de se demander si le salarié peut télétravailler sur son lieu de vacances, comme un hôtel, une résidence secondaire, un camping, un gîte, etc… Aucun texte de loi ne l’interdit, mais le salarié doit toujours informer son employeur du lieu qu’il choisit pour télétravailler. Comme pour toute demande de télétravail, l’employeur peut exprimer son refus et motiver cette décision par des éléments objectifs. Dans le cas contraire, le salarié pourra saisir le conseil des Prud’hommes.
A savoir :
Pour éviter tout problème, il est nécessaire d’inscrire les règles encadrant le télétravail dans une charte ou un accord d’entreprise, celles-ci faisant partie des clauses obligatoires recensées à l’article L1222-9 du Code du Travail.
Qu’en est-il des apprentis et des alternants ?
Les apprentis et les salariés bénéficiant d’un contrat de professionnalisation, comme tous les autres salariés de l’entreprise, bénéficient du droit de pouvoir télétravailler si c’est possible.
D’ordinaire, les entreprises sont libres de déployer leur politique salariale comme elles le souhaitent, mais la crise sanitaire vient altérer cette liberté. En effet, le protocole sanitaire incite à recourir au télétravail le plus possible. De ce fait, les apprentis et les alternants doivent être pris en charge et équipés de la même manière que les autres salariés dès que le télétravail est possible pour eux.
Comment permettre aux salariés de bien télétravailler ?
Un grand nombre de salariés n’appréciant pas particulièrement le télétravail mettent généralement en cause le manque soudain de contact humain dans leur travail. Non seulement important en terme de bien-être social, le contact est primordial pour une bonne méthode de travail.
Pour ce faire, bien maîtriser des outils de communication professionnels et opter pour des plateformes de travail collaboratives s’avèrent être des solutions efficaces. La réalisation de meetings journaliers, même très courts, permettra de prendre des nouvelles des membres des différentes équipes tout en se tenant informé de l’avancement des tâches à réaliser, des difficultés rencontrées, etc…
Les nouvelles contraintes apportées par la crise sanitaire liée à la Covid et l’évolution de la situation suggèrent fortement que le télétravail est voué à s’intensifier sur le moyen-long terme. Il est donc essentiel pour les entreprises d’inclure le plus rapidement possible cette nouvelle façon de travailler au sein de leur fonctionnement, pour mieux fonctionner à l’avenir et se détacher des contraintes économiques, sanitaires, sociétales, environnementales, etc…
Création d’une allocation télétravail
Une proposition de loi a récemment été déposée en 2022, visant à instaurer un « forfait télétravail », à savoir une allocation de 600€ par an pris en charge par l’employeur pour ses salariés qui travaillent à domicile ou dans des espaces de coworking. Ce projet n’a pas encore aboutit mais la loi actuelle prévoit déjà la possibilité de défraiement des télétravailleurs.
Bien qu’une ordonnance de 2017 n’oblige plus les employeurs à prendre en charge les coûts induits par le télétravail, il peut s’il le souhaite, rembourser le télétravailleur sur justificatifs ou lui verser une allocation forfaitaire mensuelle.
Cette allocation télétravail doit être prévue dans un accord de branche, une convention collective ou un accord d’entreprise. Les montants versés sont exonérés de cotisations sociales dans les limites suivante :
- 10 € par mois et par salarié pour 1 journée de télétravail par semaine
- 20 € pour 2 jours par semaine
- 30 € pour 3 jours par semaine
- 40 € pour 4 jours par semaine
- Jusqu’à 50 euros par mois pour les salariés étant en télétravail à 100%
Depuis début 2021, aucun justificatif n’est demandé par l’Urssaf.
Télétravail : de nouveaux risques psychosociaux ?
Le récent livre blanc de la Fédération des intervenants en risques psychosociaux (Firps) poussent les DRH à s’interroger. Les risques liés au télétravail peuvent être multiples
- Charge de travail trop importante et stress
- Flou entre le travail et la vie privée, non respect des horaires de travail et temps de repos
- Droit à la déconnexion
- Isolement du salarié
- Absence d’équipement ou difficulté à utiliser les outils informatiques
- Mauvaise organisation du travail, autonomie difficile à gérer
- Surveillance excessive des salariés
- …
L’ajustement du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) pour prendre en compte le télétravail ne suffit pas. La rédaction d’une charte ou d’un accord nécessite de définir des critères précis de poste et de métiers pour bénéficier du télétravail. Cette charte devra être équitable et prendre en compte un maximum de spécificités pour éviter d’avoir à y déroger régulièrement.
Pour éviter l’isolement et développer le sentiment d’appartenance, les managers et DRH devront repenser leurs méthodes pour favoriser la collaboration et multiplier les occasions de dialogue. Ils devront aussi être attentifs à maintenir la frontière entre la vie professionnelle et personnelle des salariés.
A savoir :
Associé à une démarche de l’employeur, le Comité Social et Economique a un rôle important pour identifier les facteurs qui peuvent être à l’origine des risques psychosociaux touchant les salariés en télétravail, ainsi que pour mettre en place des actions censées à les prévenir et réduire, voire supprimer. Pour cela, en fonction de la situation de l’entreprise, le CSE a la possibilité de réaliser un diagnostic et de mettre en place une politique de prévention, de faire appel à des experts habilités (en cas de risque grave) ou bien d’utiliser son droit d’alerte lorsque le télétravail présente un danger ou une atteinte aux droits des salariés.