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La réforme de retraites met en place un nouveau système de retraite universel, elle est présentée en Conseil des ministres le 24 janvier 2020. Elle est finalement amorcée en début d’année 2023. Adopté au Sénat le 11 mars 2023, puis officialisée par utilisation de l’article 49.3 le 16 mars 2023 et validé par le Conseil constitutionnel le 14 avril 2023, ce projet de loi a suscité de nombreux mécontentements, en partie à cause de sa complexité, mais également en raison d’autres aspects, à savoir :

  • Le report de l’âge de départ à la retraite ;
  • L’augmentation des taux de cotisations vieillesse ;
  • La réforme du compte professionnel de prévention ;
  • Etc…

De ce fait, les entreprises seront tout autant impactées que les salariés par cette réforme. Passons en revue tous les changements prévus par la réforme des retraites.

Quelles dates pour la réforme des retraites ?

 

Depuis le début de l’année 2023, la réforme des retraites a fait à nouveau vivement débat, au point que les parties opposées au projet en ont appelé à la grève. Le 19 janvier 2023, de nombreux secteurs d’activités se sont notamment mobilisés contre le projet de réforme. Une nouvelle journée de mobilisation a eu lieu le 31 janvier 2023, largement suivie par les salariés de tout bord. Ces mobilisations se sont intensifiées fin février et tout le long du mois de mars 2023.

Le projet de loi de financement rectificative de la Sécurité Sociale, portant sur la réforme des retraites, a été présenté en Conseil des Ministres le 23 janvier 2023. Il a été par la suite examiné par le Parlement, pour une adoption au Sénat le 11 mars 2023. Le 16 mars 2023, le Gouvernement a annoncé le recours au 49.3 pour officialiser le texte. Les deux motions de censure votées par la suite n’ont pas récolté assez de voix.

Le Conseil constitutionnel ayant ensuite jugé que l’essentiel du projet de loi était conforme à la Constitution, la loi de financement rectificative de la Sécurité sociale (LFRSS) pour 2023 portant la réforme des retraites a été promulguée le 14 avril 2023. Elle a été publiée au Journal officiel du 15 avril 2023, les premières mesures devant entrer en vigueur à compter du 1er septembre 2023. Des décrets sont attendus pour préciser certaines modalités des mises en œuvre des réformes.

 

Âge de départ et taux de cotisations vieillesse

 

Une des principales conséquences de la réforme est le report de l’âge de départ à la retraite, passant de 62 à 64 ans. Cette mesure, largement contestée par les syndicats et une grande partie des actifs, « n’est plus négociable » selon la première Ministre Elisabeth Borne.

Initialement actée par la réforme Touraine de 2014, celle-ci aurait dû s’appliquer de manière progressive à raison d’un trimestre toutes les trois années pour une pleine entrée en vigueur à compter de la génération née en 1973. La réforme fixe finalement le rythme d’allongement à un trimestre supplémentaire à chaque génération et une concrétisation dès la génération de 1965. Ainsi, pour cette dernière, l’âge d’ouverture à la retraite sera porté à 36 ans et 3 mois en 2027 pour atteindre 64 ans en 2030 pour les générations de 1968 et suivantes.

Parallèlement, la durée de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein sera portée à 43 ans en 2027 (génération de 1965). Pour les personnes qui n’auraient pas pu cotiser 43 ans, l’âge de la retraite à taux plein (sans décote) reste fixé à 67 ans.

Le dispositif de carrières longues est aussi adapté. Ainsi, en fonction de quand ils ont commencé à travailler, ils pourront partir à la retraite :

 

  • à 58 ans, s’ils ont commencé à travailler avant 16 ans ;
  • à 60 ans, s’ils ont commencé à travailler entre 16 et 18 ans ;
  • à 62 ans, s’ils ont commencé à travailler entre 18 et 20 ans ;
  • à 63 ans, s’ils ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans.

 

Les victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle pourront partir à la retraite pour incapacité à 60 ans (contre 62 ans dans le projet initial). Les travailleurs handicapés pourront partir à compter de 55 ans.

Par ailleurs, le Gouvernement a annoncé également une augmentation des taux de cotisations vieillesse côté employeur. L’assurance vieillesse, constituant le régime de retraite de base des salariés, se finance par les cotisations d’assurance vieillesse à charge des employeurs et des salariés. La part patronale évoluerait ainsi de +0,12% à compter du 1er janvier 2024. Dans le même temps, le taux des cotisations AT/MP diminuerait.

 

Protection des salariés face à l’usure professionnelle

 

Le report de l’âge de départ en retraite demande d’accentuer les mesures permettant le maintien des seniors sur le marché du travail en limitant leur exposition aux risques professionnels relatifs à leur tranche d’âge, qualifiés également d’usure professionnelle.

Pour cela, le projet de réforme avait envisagé différentes mesures d’accompagnement dans la reconversion des seniors en fin de carrière et de faciliter leur départ en retraite, mais uniquement à partir de 62 ans. Il sera également possible pour davantage de salariés d’ouvrir un Compte Professionnel de Prévention (ou C2P).

Le C2P permet aux salariés exposés à des risques professionnels d’acquérir des points pour chaque année d’exposition au-delà des seuils minimums initialement définis. Ces points peuvent ensuite être utilisés pour financer :

 

  • Des formations professionnelles ;
  • Un passage en temps partiel payé à temps plein ;
  • Un départ anticipé en retraite.

 

La réforme se propose d’abaisser les seuils des principaux facteurs d’exposition aux risques professionnels, permettant à d’avantage de salarier de bénéficier du C2P. Les travailleurs exposés pourront également acquérir plus rapidement des points sur leur compte.

Un nouveau cas d’utilisation du C2P est aussi prévu par la nouvelle loi : il sera désormais possible d’utiliser le C2P pour une reconversion professionnelle dans l’optique de faciliter un changement de carrière pour les travailleurs seniors. 60 points acquis sur le C2P permettront de financer une formation longue et qualifiante d’environ 30 000€. Les droits à la formation sont également renforcés : 1 point sur le C2P ouvre un droit à 500€ de financement pour une formation, contre 375€ auparavant.

 

Création d’un fonds d’investissement prévention pénibilité par la réforme des retraites

 

Le projet de réforme des retraites souhaitait également la création d’un fonds d’investissement dans la même optique de prévention face à l’usure professionnelle. En collaboration avec la Sécurité Sociale, les différentes branches professionnelles devaient identifier les postes les plus à risques sur l’aspect ergonomique et utiliser ce fonds pour mener des actions de prévention, sensibilisation et de reconversion à destination des travailleurs qui exercent un poste parmi les plus exposés à ces facteurs.

Pour accompagner cette mesure, la réforme des retraites avait prévu initialement la mise en place d’une nouvelle visite médicale de fin de carrière, obligatoire dès l’âge de 61 ans. Par l’intermédiaire de cette visite, il était alors possible d’identifier les salariés qui ne seraient plus en mesure de continuer à travailler, et, s’ils étaient reconnus comme inaptes à travailler, de bénéficier d’un départ anticipé à la retraite. Ce départ devait se faire alors à l’âge de 62 ans avec une retraite à taux plein.

Les dispositions concernant la création d’un fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle et le suivi médical spécifique pour les salariés exposés à la pénibilité ont été finalement censurées par le Conseil constitutionnel.

 

Création d’un « index senior » par la réforme des retraites

 

Bien que censurée par le Conseil constitutionnel, une des mesures prévues dans le texte de la réforme consistait à créer un index « seniors ». Ce registre aurait pour but de mettre en avant les bonnes pratiques que les entreprises mettent en place concernant les mesures d’embauche et le maintien dans l’emploi des seniors, mais également d’identifier les pratiques néfastes à ces objectifs.

L’idée de ce nouveau dispositif était donc de replacer la question de l’âge des travailleurs au cœur du dialogue social. Il devait imposer aux entreprises d’au moins 300 salariés de publier les résultats de cet index chaque année.  L’obligation de publication était prévue au 1er novembre 2023 pour les entreprises de plus de 1000 salariés, puis au 1er juillet 2024 pour celles de plus de 300 salariés.

 

Vers une retraite progressive plus facile ?

 

Le concept de retraite progressive permet aux salariés de moins de 60 ans de réduire leur activité professionnelle en fin de carrière sous réserve de respecter certaines conditions. Lorsqu’un salarié fait le choix de mobiliser sa retraite progressive, il touche à la fois le salaire correspondant à son activité à temps partiel, mais également une partie de sa pension de retraite, de base comme complémentaire. Une fois son activité définitivement cessée, ses droits définitifs à la retraite sont recalculés, en prenant en compte les périodes à temps partiel effectuées au titre de la retraite progressive.

La réforme des retraites souhaite faciliter le recours à ce dispositif. Actuellement, l’employeur est libre d’accepter ou non une demande de passage à temps partiel d’un salarié au titre de la retraite progressive. Son accord est aussi nécessaire pour définir le temps de travail du salarié et la répartition des heures de travail de manière hebdomadaire ou mensuelle. La réforme veut que ce passage en retraite progressive soit autorisé sauf réponse contraire de l’employeur justifiant une incompatibilité avec l’activité. Le temps partiel accordé pourrait même être d’une durée inférieure à 24 heures.

 

Et pour les travailleurs indépendants ?

 

Le Projet de Loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2024 engage des concertations avec les parties représentantes des professions indépendantes et leurs organismes de sécurité sociale pour réformer l’assiette sociale des travailleurs indépendants. Actuellement, les cotisations et contributions de ceux-ci reposent sur un système d’assiette sociale, relativement complexe et distincte de celle des salariés.

Le gouvernement souhaite simplifier le calcul des cotisations et contributions des indépendants pour renforcer leurs droits à la retraite. Ce renfort permettrait de se rapprocher d’une égalité entre les travailleurs salariés et indépendants. Une carrière complète sur une rémunération égale au SMIC permettrait ainsi à terme à un indépendant de toucher une pension égale à 85% du SMIC net.