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Tout au long de la carrière d’un salarié, la médecine du travail intervient à différents moments. Ces interventions permettent un suivi médical du salarié pour garantir sa santé et sa sécurité. Revoyons ensemble tout ce qu’il faut savoir concernant le suivi médical du salarié.

Suivi médical du salarié : une obligation légale

 

Le suivi médical d’un salarié tout au long de sa vie professionnelle est obligatoire. Ce suivi concerne tous les collaborateurs quel que soit la nature du contrat ou le temps de travail.

Dans le cas de métiers spécifiques, d’un état de santé particulier ou de certaines conditions de travail, le suivi s’adaptera à ces spécificités.

La réglementation actuelle est celle de la loi du 8 août 2016, appuyée par le décret du 27 décembre 2016 et s’applique depuis le 1er janvier 2017. Cette loi modernise la médecine du travail en modifiant les modalités des visites médicales ainsi que la périodicité du suivi, entre autres.

Deux décrets d’application de la Loi Santé au Travail ont été publiés au Journal Officiel le 17 mars 2022. Ils réforment les visites de reprise et de pré-reprise, ainsi que la convention de rééducation de professionnelle en entreprise et le projet de transition professionnelle. Ils instaurent également un nouveau rendez-vous « de liaison ». Ces dispositions s’appliquent à compter du 31 mars 2022 et concernent également les arrêts de travail en cours à cette date (hors visites de pré-reprise et de reprise).

Par ailleurs, un autre décret n° 2023-547 du 30 juin 2023 (JO du 1er juillet) définit les modalités du suivi médical des salariés multi-employeurs occupant des emplois identiques. Il apporte des précisions notamment sur les salariés concernés, le service de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI) compétent, les modalités de ce suivi et de la mutualisation du coût de la cotisation annuelle au SPSTI entre les différents employeurs.

 

Les visites obligatoires pour le suivi médical du salarié

 

Le Code du Travail prévoit plusieurs visites médicales obligatoires pour le salarié afin de garantir le suivi de son état de santé et de sa sécurité au travail. Elles peuvent avoir lieu à l’embauche, au cours du contrat de travail ou encore à la suite d’un arrêt de travail.

La visite d’information et de prévention

Tout salarié bénéficie obligatoirement d’une visite d’information et de prévention lors de son embauche. C’est à l’employeur d’organiser cette visite avec les centres de médecine du travail dont dépend l’entreprise.

La visite d’information et de prévention permet :

 

  • D’interroger le salarié sur son état de santé ;
  • De l’informer du suivi médical ;
  • D’identifier si le poste qu’il occupe ou sa situation nécessite une visite supplémentaire auprès du médecin du travail.

 

A savoir :
Depuis la réforme de 2016, la visite d’information peut être réalisée aussi bien par un membre de l’équipe pluridisciplinaire de santé ou un infirmier que par le médecin du travail.

En règle générale, la demande de visite se fait automatiquement lors de la déclaration préalable à l’embauche. Il est recommandé de s’assurer, employeur comme salarié, que la médecine du travail a bien transmis la date de rendez-vous pour la visite.

La visite d’information et de prévention doit se faire dans les 3 mois suivant la prise de poste. Pour les travailleurs de nuit et les salariés de moins de 18 ans, la visite doit avoir lieu avant l’affectation sur le poste.

A la fin de la visite, le praticien délivre une attestation de suivi au salarié et à l’employeur. Si le salarié a déjà bénéficié de cette visite dans les 5 dernières années avant l’embauche (dans le cas d’un précédent emploi), l’employeur n’est pas tenu de lui faire passer cette visite si :

 

  • Le salarié occupe un emploi avec des risques professionnels équivalents ;
  • Il n’as pas fait l’objet d’aménagement de poste, de mesure individuelle ou de transformation de poste dans les 5 dernières années ;
  • Le praticien de santé dispose de la dernière attestation de suivi ou du dernier avis d’aptitude du salarié.

 

La visite de reprise

Le salarié bénéficie d’une visite médicale supplémentaire après certains arrêts de travail, à savoir :

 

  • En cas de congé maternité ;
  • Lors d’une absence pour maladie professionnelle ;
  • Lors d’une absence pour accident du travail, maladie ou accident non professionnelles si l’absence a duré au moins 30 jours.

 

Cette visite doit être effectuée par le médecin du travail. Ce-dernier va vérifier si l’état de santé du salarié lui permet d’occuper son poste. Il va également préconiser l’aménagement ou l’adaptation du poste de travail si nécessaire. En cas d’avis défavorable, il délivrera un avis d’inaptitude. La visite de reprise doit avoir lieu dans les 8 jours suivant le retour effectif du salarié.

La visite de reprise est obligatoire. Un refus répété du salarié peut constituer un motif de licenciement disciplinaire, voire même pour faute grave dans certains cas.

A savoir :
Afin de soulager les SPST et renforcer l’utilité de la visite de pré-reprise, la visite de reprise ne sera plus obligatoire qu’au bout d’un arrêt de 60 jours en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

 

La visite de pré-reprise

La visite de pré-reprise concerne les salariés en arrêt de travail depuis plus de 3 mois. Bien que facultative, elle peut être organisée sur la demande du salarié, du médecin-conseil ou du médecin traitant.

Cette visite permet de préparer le retour à l’emploi. Le médecin du travail peut ainsi fournir des recommandations relatives à l’aménagement de poste du salarié, une formation ou encore un reclassement.

Le décret du 17 mars 2022 élargit les possibilités d’organisation de la visite de pré-reprise. Elle peut désormais avoir lieu pour tout arrêt d’au moins 30 jours.

Attention :
La visite de pré-reprise ne dispense pas l’employeur de prévoir par la suite la visite de reprise pour son salarié.

 

La visite médicale de fin de carrière

Un dispositif crée en 2018 par la loi de ratification des ordonnances du 22 septembre 2017 imposait une visite médicale de fin de carrière pour certains salariés. Il s’agit notamment de :

 

  • salariés occupant un poste de travail à risque et bénéficiant, à ce titre, d’un suivi individuel renforcé de leur état de santé au moment de ou antérieurement à leur départ à la retraite ;
  • salariés qui ont bénéficié d’un suivi médical spécifique du fait de leur exposition à un ou plusieurs risques professionnels antérieurement à la mise en œuvre du dispositif de suivi individuel renforcé.

 

Néanmoins, cette mesure n’est entrée en vigueur que récemment, suite à la parution du décret nécessaire à son application le 9 août 2021 (JO du 11). Ainsi, ce dispositif devient obligatoire pour les salariés dans les catégories susmentionnées et dont le départ ou mise à la retraite intervient à compter du 1er octobre 2021.

De plus, en cas d’exposition à des facteurs de risques, la loi santé du 2 août 2021 (JO du 3) impose une surveillance post-professionnelle systématique à compter du 31 mars 2022.

 

Les visites ponctuelles et examens complémentaires

En dehors des cas cités précédemment, il est possible pour le salarié, dans le cadre de son suivi médical, de bénéficier d’une visite médicale à tout moment. Ces visites peuvent se faire à l’initiative du salarié, du médecin du travail ou encore de l’employeur.

Il peut arriver que des visites ponctuelles nécessitent des examens complémentaires. Si c’est le cas, le médecin du travail les prescrira au salarié. La prise en charge sera en revanche aux frais de l’employeur.

La plupart du temps, les différentes visites médicales se font sur les horaires de travail du salarié. Si cela n’est pas possible, elles peuvent être prévues en dehors de ces horaires, à conditions qu’elles soient rémunérées comme temps de travail effectif.

En effet, le temps passé en consultation pour le suivi médical du salarié doit être inclus dans le calcul des heures supplémentaires ou dans celui des durées maximales de travail.

A savoir :
Dans les établissements comptant plus de 200 salariés, le suivi individuel des salariés peut se faire directement sur place.

 

Suivi médical du salarié : avis du médecin et recours de l’employeur

 

Selon les circonstances d’une visite médicale dans le cadre du suivi de l’état de santé du salarié, le médecin du travail peut émettre deux sortes d’avis :

 

  • Un avis d’aptitude ;
  • Ou un avis d’inaptitude.

 

Si le médecin du travail estime que le salarié peut occuper ou réintégrer son poste, il établira un avis d’aptitude. Toutefois, cet avis peut parfois inclure la demande de mise en place d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou de la durée de travail du salarié.

L’avis d’aptitude est transmis au salarié et à l’employeur. Il doit être conservé dans le dossier du salarié car il peut être demandé à tout moment par l’inspection du travail. L’employeur est dans l’obligation de tenir compte de l’avis du médecin du travail, en particulier si celui-ci préconise un aménagement de poste.

A l’inverse, le médecin du travail peut déclarer un salarié inapte à son poste dans les cas suivants :

 

  • Aucune mesure d’aménagement ou d’adaptation du poste de travail n’est possible ;
  • L’état de santé du salarié nécessite par conséquent un changement de poste.

 

Un avis d’inaptitude doit être motivé et doit préciser les consignes de reclassement du salarié (nature du poste, temps de travail, tâches à proscrire, etc…). L’employeur est dans l’obligation de s’y conformer et de proposer un reclassement à son salarié en conformité avec les préconisations du médecin. Si le reclassement est impossible, l’employeur devra procéder au licenciement du salarié pour inaptitude.

Il est possible pour l’employeur de contester un avis ou les propositions du médecin du travail par l’intermédiaire du Conseil des Prud’hommes, dans un délai de 15 jours suivant leur notification. Cette procédure n’entraîne pas la suspension du contrat de travail du salarié. S’il s’agît d’un contestation d’aptitude, l’employeur peut donc s’opposer ainsi à la reprise du travail du salarié.

L’employeur ne respectant pas ses obligations concernant le suivi médical de ses salariés s’expose à des sanctions pénales et civiles. En cas de méconnaissance des dispositions citées dans cet article, l’employeur est passible d’une contravention de 5ème classe, soit 1 500€ d’amende, et jusqu’à 3 000€ en cas de récidive