Le redressement judiciaire est une procédure qui permet la poursuite de l’activité d’une entreprise en cessation de paiements, mais dont la situation n’est pas définitivement compromise. Elle a pour objectif soit le remboursement des créanciers, soit la cession de l’entreprise. Tout d’horizon sur les étapes, les avantages et les conséquences de cette procédure.
Les étapes de la procédure de redressement judiciaire
La procédure du redressement judiciaire intervient quand une entreprise est en état de cessation des paiements, c’est-à-dire lorsque l’entreprise est déjà en retard sur ses paiement à honorer et qu’elle n’est plus en mesure de payer ses dettes à bonne date.
Pour rappel, une cession de créance est un acte juridique établi afin de transmettre la propriété d’une créance à une tierce personne. C’est un contrat consensuel nécessitant l’accord de deux parties en jeu : le créancier (ou le cédant) et le cessionnaire ou le tiers auquel il cède la créance.
Il est possible de décomposer la procédure du redressement judiciaire en trois phases distinctes :
- L’ouverture de la procédure :
Le tribunal délègue des personnes comme un juge-commissaire, un mandataire judiciaire et un administrateur judiciaire qui vont assister le chef d’entreprise dans la préparation de la période à venir (ouverture d’un compte bancaire, mesures de restructurations, réalisation d’un plan de remboursement des dettes qui peut durer jusqu’à 10 ans) ; - La période d’observation :
Pendant une période de 6 à 18 mois, sous l’égide du tribunal, la société commence l’activité à zéro, sans dettes, elle va reconstituer sa trésorerie et va se réorganiser ; - La solution au redressement :
Une solution est trouvée puis adoptée parmi celles envisageables par l’entreprise.
Les solutions au redressement judiciaire
L’objectif, à terme, est de permettre à l’entreprise de s’orienter vers l’une des quatre solutions possibles au redressement judiciaire, à savoir :
➡ Le plan de redressement
Propositions de remboursement des créanciers avec un échelonnement dans le temps. Par exemple un plan proposera aux créanciers de les rembourser à 100% en 10 ans par échéances de 10%.
➡ La cession
Il est possible que les prévisions d’activité détaillées dans le plan de redressement organisé ne soient pas compatibles avec les échéances nécessaires ; dans ce cas, le tribunal est amené, par un jugement, à ordonner la cession de l’entreprise.
➡ Le paiement des créanciers à l’issue de la période d’observation
La jurisprudence, puis la loi, ont admis que l’entreprise qui a bénéficié pendant la période d’observation de la suspension des poursuites des créanciers – et a donc pu reconstituer sa trésorerie – peut se trouver en position de régler l’intégralité de son passif ; dans ce cas, le tribunal met fin à la procédure après avoir constaté que le débiteur dispose des sommes nécessaires au règlement de l’entier passif.
➡ La liquidation judiciaire
Si le tribunal constate l’absence de solution permettant le maintien ou le transfert de l’activité, ou si le plan de redressement n’est pas respecté, la liquidation judiciaire sera prononcée. Mettant fin à l’activité de l’entreprise, cette situation peut justifier le licenciement pour motif économique d’un ou plusieurs salariés dont les emplois sont supprimés (sauf reclassement possible).
Attention !
Le tribunal peut soit accepter le plan, soit le considérer comme étant insuffisant, en fonction des réponses des créanciers.
Le mandataire judiciaire
Le salarié de l’entreprise en procédure de redressement judiciaire, contrairement aux autres créanciers, n’a pas à déclarer sa créance. C’est à un mandataire judiciaire que revient la charge d’établir le relevé des créances salariales. Celui-ci y inscrit l’ensembles des sommes dues aux salariés au titre de leur contrat de travail, à savoir :
- Les salaires ;
- Les appointements ;
- Les commissions ;
- Les accessoires ;
- Les indemnités de fin de contrat, etc…
Une fois le relevé de créances salariales établi, le mandataire le présente aux représentants du personnel, le soumet au juge commissaire et le dépose au greffe du Tribunal. Chaque salarié est ensuite informé de la nature et du montant des créances admises et rejetées, ainsi que de la date du dépôt du relevé au greffe. Le mandataire devra ensuite le publier dans un journal d’annonces légales.
Il est possible pour le salarié de contester le relevé devant le Conseil des Prud’hommes dans un délai de 2 mois à compter de sa publication dans un journal d’annonces légales. Passé ce délai, toute contestation est impossible.
Quelle situation pour les salariés en cas de redressement ?
Lors d’un redressement judiciaire, l’activité de l’entreprise continue et les contrats de travail des salariés ne sont pas suspendus. Il est toutefois légitime pour ces-derniers de se demander comment le redressement va affecter leur rémunération.
Dès l’ouverture de la procédure, les salariés sont privilégiés parce qu’ils seront payés en priorité par rapport aux autres créanciers. Lorsque l’entreprise dispose des fonds suffisants, les salaires sont payés jusqu’à concurrence d’un plafond mensuel égal au double du plafond mensuel de sécurité sociale.
Le versement des créances dues aux salariés doit être réalisé dans les 10 jours suivant le jugement d’ouverture sur ordonnance du juge-commissaire. Par contre, avant d’établir le montant des créances dues aux salariés, l’employeur ou l’administrateur doit leur verser immédiatement une somme égale à un mois de salaire impayé. Le montant est établi sur la base du dernier bulletin de salaire et se trouve plafonné à un montant égal au double du plafond mensuel de sécurité sociale.
Lorsque l’entreprise ne peut plus verser les sommes dues à ses salariés, le versement des salaires est alors assuré par l’AGS (assurance garantie des salaires). Celle-ci prend alors en charge les salaires dus avant l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire. Ceux dus après cette date restent à la charge de l’employeur.
Elle couvre également les indemnités liées à la rupture d’un contrat de travail, peu importe si la rupture se produit avant ou après l’ouverture de la procédure de redressement.
Pour activer la garantie, le mandataire judiciaire doit saisir l’AGS en démontrant l’insuffisance de fonds de l’entreprise pour pouvoir procéder au paiement des salaires. La somme lui est alors versée dans un délai de 5 jours suivant la réception du relevé de créances salariales. Le mandataire répartit ensuite les somme entre les salariés.
L’AGS couvre également les indemnités liées à la rupture d’un contrat de travail, peu importe si la rupture s’est effectuée avant ou après l’ouverture de la procédure de redressement. La garantie de l’AGS reste plafonnée selon l’ancienneté du salarié dans l’entreprise. Voici les plafonds applicables en 2023 :
- 58 656 € pour moins de 6 mois d’ancienneté ;
- 73 320 € pour une ancienneté de plus de 6 mois et moins de 2 ans ;
- 87 984 € pour plus de 2 ans d’ancienneté.
Quel rôle pour le représentant des salariés ?
Dès l’ouverture de la procédure de redressement, le Tribunal demande au CSE de l’entreprise (ou aux salariés à défaut de CSE), d’élire dans un délai de 10 jour un représentant. Celui-ci fera office d’intermédiaire et est élu au scrutin uninominal à un tour.
Son rôle est essentiel dans la mesure où le représentant fait le lien entre le salarié, le mandataire et le Tribunal. Les missions du représentant des salariés sont les suivantes :
- Vérifier le relevé de créances salariales ;
- Assister ou représenter le salarié qui conteste les créances devant les Prud’hommes ;
- Exercer les attributions du CSE si celui-ci n’existe pas dans l’entreprise.